Bruce Dévernois

Gouvernance du temps de travail et des ressources humaines

FIAT et la gouvernance du travail

• Un article de la rubrique Actualité de la gouvernance du travail & articles de presse du cabinet

Gouvernance des ressources humaines

Les faits

65 % des ouvriers de l’usine Fiat de Pomigliano ont participé mardi 23 juin 2010 à une consultation sur un accord direction/syndicats prévoyant un accroissement de la flexibilité en échange d’investissements nécessaires pour maintenir le site ouvert.

62 % des votants ont approuvé ce plan.

La flexibilité proposée consiste à mettre en place 18 rotations afin de faire fonctionner l’usine 24 heures sur 24 pendant six jours, à augmenter le nombre des heures supplémentaires et à réduire les temps de pause.

Dans ce nouveau cadre, l’indemnité maladie prise en charge par Fiat en cas d’absentéisme jugé « anormal » est supprimée et des sanctions allant jusqu’au licenciement en cas de non-respect de l’accord sont prononcées.

Cet aménagement des conditions de travail a pour but de rendre l’usine plus compétitive et dans ces conditions permettre une relocalisation d’une ligne de production du plus récent modèle de la Panda actuellement produite à Tychy en Pologne, moyennant un investissement de 700 millions d’euros.

Seul un seul syndicat, la Fiom, s’est opposé à cet accord.

Pour Maurizio Del Conte, professeur de droit du travail à l’université milanaise Bocconi, « cet accord représente un symbole pour le système industriel italien et marque un tournant dans les relations du travail en Italie. Ces dernières pourraient radicalement changer en s’orientant vers une plus grande cogestion entre syndicats et entreprises ».

A la sortie de l’usine à la mi-journée du 23 juin 2010, la plupart des ouvriers venus pour la rotation du matin indiquaient qu’ils n’avaient « pas le choix ».

Et la gouvernance du travail dans tout cela ?

Le montage proposé respecte certainement les équilibres économiques, et de ce fait, est nécessaire au montage de cette relocalisation. Les syndicats, à l’exception de la Fiom, pour laquelle cet accord va notamment à l’encontre du droit de grève, l’ont compris.

Mais pour autant, si les salariés ont été consultés sur l’accord, ils ne l’ont pas été sur les nombreuses solutions alternatives qui auraient pu conduire au même résultat avec un peu moins de résignation enregistrée à la sortie de l’usine.

« Comment voulez-vous qu’un travailleur vote pour la fermeture de son usine ? », a déclaré à cet égard à l’AFP Fernando Liuzzi, en rappelant que les travailleurs de Pomigliano étaient au chômage technique depuis plusieurs semaines.

Cet exemple montre avec force, les progrès immenses qui peuvent être faits en matière de gouvernance du travail. Pourquoi imposer une solution toute faite venue d’en haut (employeur et syndicats ) ? Parmi les solutions alternatives a-t-on examiné un travail 7 jours sur 7 pour augmenter encore davantage la productivité des équipements ? A-t-on cherché à savoir s’il y avait des volontaires pour travailler en travail réduit de fin de semaine ? A-t-on mesuré l’appétence des salariés pour effectuer des heures supplémentaires ? A-t-on examiné l’organisation d’un marché du travail au sein de l’entreprise où chacun serait venu proposer son offre de travail supplémentaire en fonction de sa situation personnelle, avec un système de majoration calibré en fonction de la pénibilité, ce qui aurait permis de dégonfler l’absentéisme et éviter des sanctions de premier niveau aveugle, inutilement violentes, stressantes et donc contreproductives parce que source de risques psychosociaux accrus ?

Le succès de l’accord FIAT pour relocaliser une ligne de production en Italie s’inscrit-il dans la cadre d’une bonne gouvernance du travail ou bien a-t-on raté une marche avec des effets négatifs à moyen terme ?

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Bruce Dévernois, Avocat
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