Cadrage macroéconomique de la flexibilité interne choisie
• Un article de la rubrique Cadrage historique et économiqueLe rapport du Conseil d’Analyse Economique sur « Les leviers de la croissance française » (1) chiffre à 0,25 point récurrent de croissance annuelle du PIB, une baisse des rigidités sur le marché du travail par alignement partiel sur le modèle anglo-saxon.
Pour calculer ce chiffre, les auteurs se sont basés sur un indicateur mesurant l’écart entre la France et les pays anglo-saxons en matière de législation protectrice de l’emploi. C’est la réduction de cet écart qui permet d’augmenter le potentiel de croissance de l’économie française. Il s’agit donc en l’occurrence d’une mesure tendant à renforcer la flexibilité de l’emploi externe à l’entreprise.
Dans le cas du développement d’une flexibilité de l’emploi interne à l’entreprise (inexistante dans les pays anglo-saxons), c’est-à-dire d’une variation du volume de travail à effectif constant, d’une part, les traumatismes liés aux ajustements de l’emploi sont beaucoup moins importants pour les salariés et en particulier pour les plus fragiles, d’autre part, la réglementation en France permet déjà de la mettre en œuvre, bien que peu utilisée dans les faits (et d’ailleurs peu étudiée s’agissant des combinaisons très nombreuses des dispositifs juridiques existants).
Les ajustements que permet la flexibilité interne choisie peuvent être significatifs (jusqu’à + ou – 35 % du volume de travail à effectif constant, voire plus) avec une variation corollaire de la masse salariale et une augmentation des résultats de l’entreprise toutes choses égales d’ailleurs. Les retours d’expérience montrent que l’usage de la flexibilité interne choisie permet de maintenir un bon climat social contrairement à celui de la flexibilité externe. Cela permet également d’augmenter les gains de productivité en période normale et de limiter les baisses de productivité lors des mouvements conjoncturels baissiers, ce qui conduit à une augmentation structurelle de l’excédent brut d’exploitation rapporté à la valeur ajoutée.
Développer une politique globale de gouvernance du travail
Articuler une GPEC active en matière de formation, notamment sur la base d’un « volontariat incité » permet de renforcer l’efficience de la flexibilité interne choisie.
Couplée avec une politique de départ sur la base du volontariat, la flexibilité interne choisie répond pour une grande part aux nécessaires besoins d’adaptation des entreprises et de l’économie en général. Un assouplissement de la réglementation qui consisterait à créer une procédure spécifique de départs sur la base du volontariat pour raison économique sans l’inscrire dans le cadre de la procédure des plans sociaux, serait à ce titre, une avancée juridique et sociale significative.
L’effet d’une mise en œuvre massive de la flexibilité interne choisie devrait normalement permettre de majorer significativement le potentiel de croissance annuelle récurrente lié à une baisse des rigidités sur le marché du travail. Il a été évalué avec Gilbert Cette à au moins 0,5 point de PIB.
Autorisant une gestion plus fine de l’effectif désiré, elle limite le nombre et l’ampleur des ajustements externes « hire and fire » à l’anglo-saxonne. Améliorant les résultats des entreprises de façon structurelle, elle est un outil de développement actuellement peu soutenu par les institutions (partenaires sociaux et administrations).
Le développement de la flexibilité interne choisie représente certainement une opportunité de desserrement de la « trappe à faible croissance » dans laquelle se situe l’économie française par une amélioration substantielle de sa productivité et de sa compétitivité.
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(1) Rapport du Conseil d’Analyse Economique n° 72 sur « Les leviers de la croissance française » par Philippe Aghion, Gilbert Cette, Elie Cohen et Jean Pisani-Ferry in La Documentation Française 2007)
Bruce Dévernois, Avocat