Relancer le travail à temps partagé pour créer massivement des emplois
• Un article de la rubrique Propositions d’évolution du droit positif en FranceL’idée du travail à temps partagé est de transformer des bouts de missions dans différentes entreprises en emplois stables. L’activité de travail à temps partagé qui a été défini par la loi du 2 août 2005 en faveur des PME ne peut être mie en oeuvre que moyennant une ingénierie particulière complexe. Ce qui a découragé jusqu’à ce jour sa mise en oeuvre, bien que cela reste faisable.
Si les pouvoirs publics souhaitent que se développe cette activité qui est potentiellement source d’importantes créations d’emplois, il conviendrait de revoir la loi de 2005 pour la rendre plus accessible. C’est dans cet esprit que nous proposons ci-après une proposition de loi visant à relancer le travail à temps partagé.
Travail à temps partagé, proposition de loi
… visant à sécuriser juridiquement la mise en œuvre d’une activité d’entreprise de travail à temps partagé et à tracer les conditions et voies possibles de son développement
Exposé des motifs
La loi du 2 août 2005 a créé « l’entreprise de travail à temps partagé ». Ce dispositif est né du constat que certains salariés éprouvant des difficultés à trouver un emploi stable à temps plein pouvaient partager leurs compétences entre plusieurs entreprises.
Il est à noter que d’autres dispositifs de mise à disposition existent, avec des cadres juridiques de tiers employeurs différents. Une certaine confusion existe donc et une clarification du rôle rempli par chacun s’impose.
Il s’agit, outre les entreprises de travail à temps partagé, des groupements d’employeurs, du portage salarial, du travail temporaire et du prêt de main d’œuvre sans but lucratif.
Les groupements d’employeurs, traités dans les articles L. 1253-1 à L. 1253-23 du code du travail, constituent un mécanisme particulier pour développer une mutualisation de l’emploi entre des entreprises de 300 salariés et moins, sauf cas particulier, qui doivent adhérer à un groupement, dans la limite de deux, préalablement à une mise à disposition de personnel sans but lucratif.
Les entreprises de portage salarial, traitées à l’article L. 1251-64 du code du travail, organisent pour certaines personnes (comme par exemple des consultants) qui souhaitent développer une activité indépendante, la faculté d’être traités comme des salariés au lieu d’être sous forme libérale ou d’une société d’exploitation, moyennant une rémunération correspondant aux services rendus. Par ailleurs, sont garantis les droits de la personne portée sur son apport de clientèle. Les entreprises de portage salarial ont été créées en marge du droit, puis la loi du 25 juin 2008 est venue les légaliser et organiser la construction d’un accord de branche dans les deux ans suivant sa promulgation.
Les entreprises de travail temporaire (qu’on appellera ETT), traitées dans les articles L. 1251-1 à L. 1251-59 du code du travail, mettent à disposition de façon temporaire et pour une durée limitée du personnel notamment pour remplacer des salariés absents, en cas d’accroissement temporaire d’activité ou pour des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
Quand au prêt de main d’œuvre sans but lucratif entre deux entreprises, autorisé par l’article L. 8241-2 du code du travail, il demeure exceptionnel et son rôle dans la promotion de l’emploi reste très limité.
Dans ce camaïeu de dispositifs, on comprend pourquoi le concept de temps partagé apparaissait en 2005 comme une réponse prometteuse en termes de création, de pérennisation et d’innovation concernant l’emploi puisqu’il s’agissait de créer des emplois dans le cadre de contrat de travail à durée indéterminée à partir de gisements d’activité morcelés entre plusieurs entreprises.
Pourtant le dispositif des entreprises de travail à temps partagé (qu’on appellera par commodité « ETTP »), traité dans les articles L. 1252-1 à L. 1252-13 du code du travail, ne s’est pas développé depuis 2005. Pourquoi ?
Essentiellement parce qu’il souffre, par construction, de nombreuses lacunes juridiques, voire de certaines contradictions, qui font que les acteurs économiques susceptibles de créer des ETTP se sont trouvés, non seulement confrontés à une certaine insécurité juridique avec des confusions potentielles fortes avec les autres dispositifs de mise à disposition que sont le travail temporaire et le portage salarial, mais également à devoir inventer une ingénierie juridique sophistiquée pour mettre en œuvre cette activité.
Comment en effet réconcilier le fait que l’actuelle réglementation exige en même temps la signature d’un contrat de travail avec l’ETTP pour chaque mission temporaire confiée à une entreprise utilisatrice en même temps qu’un contrat de travail à durée indéterminée avec cette même ETTP ? Comment articuler cette activité d’ETTP avec celle d’ETT alors même que l’article L. 1252-3 actuel du code du travail indique que les ETT peuvent exercer l’activité d’entreprise de travail à temps partagé ? Comment démarrer l’organisation d’une ETTP, alors même que des accords d’entreprises sont nécessaires pour y organiser le temps de travail, et que le deuxième alinéa de l’actuel article L. 1252-2 du code du travail précise d’ailleurs à juste titre que les salariés mis à disposition le sont pour des missions qui peuvent être à temps plein ou à temps partiel ? Quels conventions et accords collectifs appliquer sur le lieu de travail dans les entreprises utilisatrices ?
Autant de lacunes, voire de contradictions qui sont venues empêcher concrètement le développement des ETTP.
Il convient donc de revoir, définir, compléter, expliquer, orienter et articuler le dispositif institué par la loi du 2 août 2005 avec le droit de la mise à disposition dans son ensemble pour le rendre opérationnel, efficace et véritablement créateur d’activités, d’emplois et de revenus.
Si l’on souhaite que les ETTP soient effectivement pourvoyeuses d’emplois du fait du partage de l’activité d’un salarié entre plusieurs entreprises, il convient d’abord de définir leur rôle économique, technique et social.
Ce rôle est fondamentalement celui d’une intermédiation entre une offre potentielle d’activité dans des entreprises utilisatrices dont l’ETTP doit être le révélateur (c’est sa valeur ajoutée) et une demande d’emplois stables de la part de la société.
Par définition, cette offre potentielle d’emplois apparaît morcelée et est difficile à identifier et à concrétiser. Elle a également pour caractéristique d’être à visibilité réduite, le plus souvent à court terme, voire, au mieux, à moyen terme.
Il s’agit donc d’organiser et de rendre possible dans les entreprises utilisatrices, le captage d’opportunités d’activités parcellaires, voire à récurrence réduite, par la mise à disposition de salariés avec les compétences requises sachant que la multiplication de ces activités a vocation à construire des emplois les plus stables et complets possibles.
Le rôle d’intermédiation des ETTP consiste donc à organiser et rapprocher une offre d’activités morcelées et à court terme dans des entreprises utilisatrices et une demande de travail stable à long terme, un peu comme les institutions financières rapprochent ou, autrement dit, transforment des ressources financières à court terme en « emplois » (investissements) à long terme. C’est tout l’enjeu de la mise en place des entreprises de travail à temps partagé.
Ce rôle d’intermédiation des ETTP apparaît en pointillé lorsqu’on rapproche les actuels articles L. 1252-1 et L. 1252-4 du code du travail. En effet, le premier article indique la nécessaire conclusion :
1. de contrats de mise à disposition auprès d’entreprises utilisatrices
2. de contrats de travail pour chacune de ces missions avec le salarié mis à disposition
… et le second indique :
1. le contrat de travail à temps partagé est réputé à durée indéterminée.
A l’évidence cette rédaction manque de clarté, puisqu’elle évoque en apparence plusieurs contrats de travail qui, en fait, n’en sont qu’un seul : ainsi les contrats de travail de la dernière phrase de cet article L. 1252-1 ne sont que des avenants à durée déterminée qui viennent s’inscrire dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée de l’article L. 1252-4.
Il n’en reste pas moins qu’arriver à juxtaposer plusieurs missions courtes dans différentes entreprises utilisatrices pour recomposer un poste de travail à temps partagé stable, demande du temps, de l’expérience et une ingénierie particulière.
Il paraît donc utile d’amorcer cette construction en qualifiant ledit poste de travail à temps partagé dès lors que la première « convention de mise à disposition » auprès d’une entreprise utilisatrice (rebaptisée « convention » pour éviter toute confusion avec le contrat de travail à durée indéterminée) est signée pour une mission comportant une certaine récurrence qui pourrait être définie comme la répétition d’un même travail sur au moins deux périodes différentes (à titre d’exemple, deux années de suite).
Cette construction suppose par ailleurs que soient résolues deux difficultés :
1. une organisation particulière du contrat de travail à durée indéterminée avec tout particulièrement l’organisation d’un volume de travail de base qui vienne rendre « faisable » la couverture de l’engagement financier de l’ETTP,
2. l’articulation éventuelle du travail d’un salarié à temps partagé avec d’autres formes de travail pour laisser le temps à l’ETTP de rechercher et accroître progressivement, en fonction du souhait de chaque salarié concerné, le volume de travail à temps partagé.
La première de ces difficultés nécessite la construction d’un contrat à durée indéterminée dans les conditions particulières suivantes :
1. le contrat de travail à durée indéterminée de base doit fixer les conditions générales de travail et de rémunération avec notamment une durée de base sur laquelle l’ETTP s’engage. Cette durée pourra notamment être exprimée soit par un nombre de jours de travail convenu à l’année dans le cadre d’une convention de forfait annuel en jours pour les salariés autonomes, soit par un nombre d’heures annuelles à effectuer sans qu’il y ait, dans les deux cas de figure, à fixer un nombre minimum de jours ou d’heures. Cette organisation doit se faire dans le cadre de la réglementation actuelle, notamment s’agissant de celle relative au temps partiel, lorsque le temps de travail est décompté en heures. Au-delà de cette durée de base, devront également être déterminées les modalités de rachat de jours de repos ou d’heures complémentaires. Pour rendre accessible ces dispositions, un accord collectif d’entreprise ou de branche concernant l’organisation du temps de travail devra, si nécessaire, avoir été préalablement conclu. Ces conditions générales devront également nécessairement comporter l’engagement par le salarié de conclure, à tout moment et à la demande de l’ETTP, au moins un avenant à son contrat de travail permettant de couvrir au moins le nombre de jours ou d’heures prévues comme durée de base, le non respect de cet engagement étant équivalent à une démission,
2. doivent par ailleurs être signés autant d’avenants à ce contrat de travail de base qu’il y a de conventions de mise à disposition avec une ou des entreprises utilisatrices. Ces avenants précisent le contenu de chaque mission au fur et à mesure que les conventions de mise à disposition sont signées avec les entreprises utilisatrices, la durée estimée de chacune de ces missions et, le cas échéant, des compléments de rémunération, par exemple attachés à une production de valeur ajoutée effective,
3. doit être également garantie une rémunération journalière ou horaire versée au salarié mis à disposition d’une entreprise utilisatrice au minimum égale à la moyenne de celles d’un salarié de niveau de qualification professionnelle identique ou équivalent occupant le même poste ou les mêmes fonctions dans l’ensemble des entreprises utilisatrices.
La seconde difficulté nécessite, pour être surmontée, d’organiser, le cas échéant, le cumul du contrat à durée indéterminée signé avec l’ETTP, avec d’autres types de contrats permettant aux salariés concernés de pouvoir bénéficier rapidement et s’ils le souhaitent, d’un temps de travail se rapprochant d’un temps plein, voire le dépassant. Pour aider cette construction dans le temps, il convient de pouvoir, le cas échéant, organiser les temps sans activité, temps d’intermissions ou encore temps qu’il n’est pas prévu d’utiliser dans le cadre du contrat à durée indéterminée à temps partagé de toutes les manières possibles et en particulier :
1. dans le cadre d’un travail temporaire en intérim organisé par une ETT, elle-même exerçant l’activité d’une ETTP ou non,
2. dans le cadre d’un contrat de travail organisé par une entreprise de portage salarial, elle-même exerçant l’activité d’une ETTP ou non,
3. dans le cadre d’un contrat à durée déterminée ou encore à durée indéterminée directement conclu avec n’importe quelle autre entreprise, pourvu que la somme des durées de travail prévues aux différents contrats de travail d’un même salarié respectent les durées maximales du travail,
4. dans le cadre d’une activité d’auto-entrepreneur,
5. ou, enfin, dans le cadre de l’activité propre de l’ETTP ayant conclu le contrat à durée indéterminée.
Pour en favoriser l’essor, il convient d’étendre la faculté d’exercer l’activité d’entreprise de travail à temps partagé non seulement aux ETT, comme la loi du 2 août 2005 l’avait prévu, mais également aux entreprises de portage salarial.
Pour lancer le démarrage d’une activité d’entreprise de travail à temps partagé, son responsable, s’il le souhaite, doit avoir la faculté d’appliquer aux salariés de l’activité d’entreprise de travail à temps partagé, de façon volontaire, une convention collective et les accords concernant le temps de travail de la branche qu’il juge la plus appropriée aux objectifs poursuivis. Il doit le faire en accord avec les délégués syndicaux de son entreprise, s’ils existent. Cette faculté est temporaire. Elle doit cesser dès lors que sera négociée et mise en place une convention collective propre aux ETTP.
Les ETT et les entreprises de portage salarial qui exercent l’activité d’ETTP doivent également avoir la faculté, à défaut de choisir d’appliquer une convention collective et les accords concernant le temps de travail d’une branche en particulier aux salariés de leur activité d’entreprise de travail à temps partagé, la faculté de négocier avec leurs partenaires sociaux des accords d’entreprise s’appliquant spécifiquement à leurs salariés à temps partagé.
Ainsi les salariés en CDI dans le cadre d’une activité ou d’une entreprise de travail à temps partagé (TTP) mis à disposition d’entreprises utilisatrices, seront régis par une seule convention collective et/ou par les accords collectifs de l’entreprise à laquelle ils sont attachés concernant notamment l’organisation du temps de travail et de ses contreparties applicables, quelles que soient par ailleurs les conventions et accords collectifs applicables aux salariés des entreprises utilisatrices, sachant que ces dernières demeurent responsables des conditions d’exécution du travail des salariés mis à leur disposition, conditions qui sont rappelées dans la convention de mise à disposition qui lie l’ETTP à l’entreprise utilisatrice.
Pour réaliser efficacement son « intermédiation », une ETTP ou un département d’une ETT ou d’une entreprise de portage salarial exerçant une activité TTP doit apporter une valeur ajoutée consistant à :
1. identifier les poches potentielles d’activité existant au sein des entreprises qui ne peuvent faire l’objet d’une offre d’emploi permettant d’assurer la subsistance d’un salarié,
2. identifier, suivre, accompagner et former les personnels capables de prendre en charge ces activités,
3. organiser, dans la mesure du possible, la montée en puissance de l’activité de chacun de ses salariés (l’ETTP « imprésario »),
C’est la raison pour laquelle, l’actuel article L. 1252-11 du code du travail doit être aménagé de façon à ce que l’investissement de l’ETTP dans cette intermédiation soit encouragé et protégé. Ainsi, s’il convient de ne pas interdire le recrutement du salarié mis à disposition par l’entreprise utilisatrice, conditionner ce recrutement au paiement d’un dédit par cette dernière représente une protection nécessaire de cet investissement.
De son côté, le salarié à temps partagé apporte, pour l’entreprise utilisatrice les avantages suivants :
1. apport d’un œil externe du fait de son intervention dans plusieurs entreprises et de sa formation prise en charge spécifiquement par l’ETTP,
2. adéquation fine entre compétence et activité, source et levier de nouveaux accroissements de productivité et de réduction des coûts par rapport au système traditionnel du salariat, lequel sera de plus en plus concurrencé par les pays émergents
3. responsabilisation et transformation de la relation de travail vers un rapport de fournisseur à client, source de revenus fondée sur un réel apport de valeur ajoutée et à ce titre économiquement viable, et également source de motivation et d’intérêt au travail et puissante antidote au développement du stress souvent constaté dans le cadre du travail salarié du fait de la situation de mineur social produite par le lien de subordination.
L’avantage du salarié de l’ETTP est que, signant un avenant à son contrat de travail pour chaque nouvelle mission que l’ETTP lui propose, il peut faire varier en permanence tant son niveau d’activité que ses revenus en fonction de ses seuls souhaits, n’étant en rien tenu d’accepter de nouveaux avenants à son contrat de travail, étant entendu que ce niveau d’activité reste néanmoins fonction de l’offre générale sur le compartiment du marché du travail dans lequel il déploie ses compétences et exerce son activité.
L’ETTP remplit ainsi plusieurs rôles :
1. elle permet de valoriser progressivement des gisements d’activités et donc d’emplois autrement inexploitables, notamment en apportant aux entreprises utilisatrices une nouvelle source de flexibilité ciblée leur permettant de mieux coller aux variations de leur activité
2. elle représente un champ d’expérimentation de nouvelles relations du travail, le lien de subordination se trouvant, sinon juridiquement, du moins sociologiquement distendu, le salarié qui le souhaite ayant ainsi l’opportunité de développer une liberté et une autonomie accrue, un choix de temps travaillé et de revenus, un exercice plus ciblé de ses compétences et talents et probablement moins de stress que dans une relation salariale plus classique et ce d’autant plus qu’une partie de sa rémunération aura été conditionnée à l’obtention d’une production de valeur ajoutée identifiée,
3. elle autorise pour certaines populations la constitution d’un revenu de complément pouvant être cumulé, le cas échéant, avec une retraite ou avec une allocation chômage en cas d’activité réduite ou occasionnelle. En particulier, il est à noter que ce système devrait permettre de développer l’emploi et le revenu des seniors et des retraités qui le souhaiteraient, et notamment être l’occasion d’assurer un meilleur transfert des savoir-faire et des expériences,
4. elle tend à assurer un cadre d’accompagnement et une meilleure sécurité juridique pour les salariés qui souhaitent construire un parcours professionnel original et progressif notamment s’agissant d’une éventuelle insertion professionnelle.
Pour cela, il apparaît utile de modifier les articles du code du travail organisant actuellement l’activité d’entreprise de travail à temps partagé de manière à sécuriser juridiquement sa mise en œuvre et à tracer les conditions et voies possibles de son développement de la manière suivante :
• à l’article L. 1252-1 du code du travail, en indiquant l’objet économique du recours au travail à temps partagé, le rôle des entreprises de travail à temps partagé et l’ensemble des conditions juridiques de la mise à disposition des salariés de l’ETTP auprès d’entreprises utilisatrices,
• à l’article L. 1252-2 du code du travail, en indiquant les conditions requises pour pouvoir être entrepreneur de travail à temps partagé,
• à l’article L. 1252-3 du code du travail, en étendant la faculté d’exercer l’activité d’entreprise de travail à temps partagé non seulement aux ETT, mais également aux entreprises de portage salarial,
• à l’article L. 1252-4 du code du travail, en fixant les règles régissant l’établissement et l’exercice d’un contrat de travail à durée indéterminée entre un salarié et l’entreprise de travail à temps partagé qui l’emploie,
• à l’article L. 1252-6 du code du travail, en fixant les règles relatives à la garantie salariale unitaire d’un salarié exerçant une activité à temps partagé,
• à l’article L. 1252-7 du code du travail, en spécifiant les règles conventionnelles applicables aux salariés exerçant une activité à temps partagé.
• à l’article L. 1252-11 du code du travail, en réglementant le recrutement du salarié mis à disposition par l’entreprise utilisatrice.
En conséquence, nous vous demandons de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante :
Proposition de loi
Article unique :
L’article L. 1252-1 du code du travail est ainsi modifié :
« Le recours au travail à temps partagé a pour objet de faire émerger des emplois stables à moyen/long terme à partir d’activités réparties de façon parcellaire, morcelée et à faible récurrence dans le temps entre plusieurs clients utilisateurs.
Le travail à temps partagé est organisé par des entreprises de travail à temps partagé dont le rôle est :
1. d’identifier les poches potentielles d’activité partielle existant au sein d’entreprises utilisatrices,
2. d’identifier, suivre, accompagner et former les personnes capables de prendre en charge ces activités,
3. d’organiser, dans la mesure du possible, la montée en puissance de l’activité de chaque salarié entrant dans ce processus.
Le travail à temps partagé consiste à mettre à disposition un salarié d’une entreprise de travail à temps partagé au bénéfice de clients utilisateurs pour l’exécution de missions, chaque mission donnant lieu à la conclusion :
1. d’une convention de mise à disposition entre l’entreprise de travail à temps partagé et un client utilisateur,
2. d’un avenant au contrat de travail à durée indéterminée entre le salarié et l’entreprise de travail à temps partagé. »
L’article L. 1252-2 du code du travail est ainsi modifié :
« Est un entrepreneur de travail à temps partagé, toute personne physique ou morale dont l’activité exclusive à l’exception de celles prévues à l’article L. 1252-3 du code du travail, et nonobstant les dispositions de l’article L. 8241-1 du présent code, est de mettre en œuvre l’alinéa 1 de l’article L. 1252-1 du présent code. »
L’article L. 1252-3 du code du travail est ainsi modifié :
« Les entreprises de travail temporaire ainsi que les entreprises de portage salarial peuvent exercer l’activité d’entreprise de travail à temps partagé. »
L’article L. 1252-4 du code du travail est ainsi modifié :
« Le contrat de travail d’un salarié d’une entreprise de travail à temps partagé est conclu pour une durée indéterminée.
Il comporte obligatoirement les éléments suivants :
1. les conditions générales de travail et de rémunération avec notamment une durée de base sur laquelle l’entreprise de travail à temps partagé s’engage et qui pourra notamment être exprimée soit par un nombre de jours de travail convenu à l’année dans le cadre d’une convention de forfait annuel en jours pour les salariés autonomes, soit par un nombre d’heures annuelles à effectuer sans qu’il y ait un nombre minimum de jours ou d’heures à fixer, la réglementation du temps partiel s’appliquant le cas échéant s’agissant du décompte de la durée du travail en heures,
2. les modalités de rachat des jours de repos ou d’heures complémentaires,
3. l’engagement par le salarié, à la demande de l’entreprise de travail à temps partagé, de signer un ou plusieurs avenants à son contrat de travail couvrant la durée de base qui y est prévue, le non respect de cet engagement équivalent à une démission.
De plus, au moment de sa conclusion initiale, ce contrat de travail doit être complété par un avenant spécifique qui marque à l’origine sa qualité de contrat de travail à temps partagé. Cet avenant d’origine correspond à la première convention de mise à disposition dudit salarié auprès d’un client utilisateur, laquelle doit spécifier que cette mise à disposition est organisée par la répétition au moins une fois d’une première mission sur deux périodes différentes.
Toute entrée en vigueur d’une convention de mise à disposition chez un client utilisateur est subordonnée à la conclusion par le salarié à temps partagé d’un avenant à son contrat de travail précisant le contenu de chaque mission, la durée estimée de chacune de ces missions et, le cas échéant, les compléments de rémunération, par exemple attachés à une production de valeur ajoutée effective. »
Le salarié titulaire d’un contrat de travail à temps partagé peut, de droit commun, cumuler ce contrat avec notamment tout autre contrat de travail et activité rémunérée qui s’exerceraient en dehors des périodes de travail prévues au contrat de travail à temps partagé, en particulier :
1. un contrat de travail dit « de mission » avec une entreprise de travail temporaire, cette dernière exerçant ou non l’activité d’une entreprise de travail à temps partagé,
2. un contrat de travail organisé par une entreprise de portage salarial, elle-même exerçant l’activité d’une ETTP ou non,
3. un contrat à durée déterminée ou encore à durée indéterminée directement conclu avec n’importe quelle autre entreprise, pourvu que la somme des durées effectives de travail prévues aux différents contrats de travail respectent les durées maximales du travail,
4. dans le cadre d’une activité d’auto-entrepreneur,
5. ou, enfin, dans le cadre de l’activité propre de l’entreprise de travail à temps partagé ayant conclu le contrat à durée indéterminée.
L’article L. 1252-6 du code du travail est ainsi modifié :
« La rémunération journalière ou horaire versée au salarié mis à disposition d’une entreprise utilisatrice au minimum égale à la moyenne de celles d’un salarié de niveau de qualification professionnelle identique ou équivalent occupant le même poste ou les mêmes fonctions dans l’ensemble des entreprises utilisatrices. »
L’article L. 1252-7 du code du travail est ainsi modifié :
« Pendant la durée de la mise à disposition, l’entreprise utilisatrice est responsable des conditions d’exécution du travail telles qu’elles sont déterminées dans la convention de mise à disposition. En particulier sont applicables aux salariés exerçant un travail à temps partagé, les dispositions légales et conventionnelles, notamment pour ces dernières celles conclues dans le cadre d’une activité d’entreprise de travail à temps partagé et cela nonobstant les dispositions légales et conventionnelles applicables aux salariés de l’entreprise utilisatrice. Toutefois, pour ce qui concerne les dispositions de santé et de sécurité au travail, les dispositions applicables au lieu de travail sont réputées s’appliquer.
En attendant l’élaboration d’une convention collective de branche relative au travail à temps partagé, le responsable d’une entreprise de travail à temps partagé ou ceux d’une activité d’entreprise de travail à temps partagé logée dans une entreprise de travail temporaire ou de portage salarial, peuvent, en accord avec les représentants des organisations syndicales au sein de l’entreprise, s’ils existent, décider d’appliquer volontairement la convention collective et les accords concernant le temps de travail de la branche qu’ils jugent la plus appropriée à l’exercice de l’activité de travail à temps partagé qu’ils organisent. Dans ce dernier cas, seuls cette convention et ces accords sont applicables aux salariés mis à disposition dans les entreprises utilisatrices à l’exclusion de la convention collective et des accords de branche ou d’entreprise s’appliquant aux salariés des entreprises utilisatrices.
Les accords d’entreprise conclus au sein des entreprises de travail temporaire ou des entreprises de portage salarial qui exercent une activité d’entreprise de travail à temps partagé, peuvent viser spécifiquement les salariés relevant de cette dernière activité. »
L’article L. 1252-11 du code du travail :
« Toute clause tendant à interdire le recrutement du salarié mis à disposition par l’entreprise utilisatrice à l’issue de sa mission n’est valide que si elle s’accompagne pour cette dernière de la possibilité d’y déroger moyennant le versement d’un dédit. »
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(1) Document préparé et rédigé par Bruce Dévernois, Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine dans le domaine de la gouvernance des ressources humaines, le 24 février 2010.
Bruce Dévernois, Avocat
Bonjour,
Je vous remercie pour cet article très documenté.
Qu’est devenue la proposition de loi ?
Y a t il eu des évolutions réglementaires ?
Pour finir, j’ai un projet de création de sociétés de services aux entreprises dans lequel j’envisage d’inclure la prestation « travail à temps partagé ». Pensez vous que cela peut-être viable ?
Bien cordialement.